samedi 31 juillet 2010

Bâtir et renaître






Voici quelques photos de notre passage à la Ferme du Bonheur en juin dernier. Merci à Valérie pour les images ci-dessus. On peut continuer d'alimenter ce post en nous envoyant celles que vous avez auriez prises durant ces deux semaines. Ces traces sont importantes pour nous. Elles témoignent de ce qui a eu lieu.



Nous reprenons notre parcours commun le 7 octobre à 20 h. Ce sera une apparition unique à la Maison des Métallos dans le cadre d'un semaine consacrée à la Fondation Abbé Pierre.




Sinon, on construit à Gagny. La boutique a été rasée, ne restent aujourd'hui que la petite cantine, les douches, la buanderie. A la place du jardin sur lequel nous avons commencé ce spectacle voilà plus d'un an, il y a maintenant un grand trou qui laisse entrevoir les fondations sur lesquelles vont être bâties un nouveau centre d'accueil plus spacieux, moins vétuste. Tout devrait sortir de terre en décembre.
Les choses changent et nous marchons.

mercredi 12 mai 2010

NOTE D'INTENTION / 2010


UN PROBLEME D’ADAPTATION

“It sucks when it’s over and you can’t get it back.
Why do we all want to, like a pack of necrophiliacs” (Vic Chesnutt, Over)


Il est toujours délicat d’adapter un roman, surtout quand il s’agit d’un roman que tu adores. Le fanatisme, la dévotion sont les monstres qui vivent en permanence sous ton bureau, ne demandant qu’à sortir pour t’aveugler et te clouer au lit. Plus tu avances dans l’entreprise, plus tu te rends compte que ces histoires d’adaptation fidèle ne tiennent pas. Ces histoires «d’adaptation fidèle» ne trompent personne. Tu délaisses alors le pinceau fin du copiste appliqué pour la masse, la grenade, la hache. Tu triches, tu biaises, tu rapièces. Tu ravales tes prétentions et prends le truc à rebours. Ça commence en octobre 2002 dans une chambre. Aujourd’hui, à force d’explorer l’œuvre originale pour en tirer le suc, Ripley Bogle a fini par devenir mon intime et mon maître. Le monstre qui dormait autrefois sous mon bureau a rejoint en silence ma couche (à moins que ce ne soit moi qui l’y ai invité?). Bref, j’ai poussé trop loin le travail, mu sans doute par une ferveur adolescente et des visées de démiurge. Un double est né en moi, une créature monstrueuse née de la conjugaison de mes fantasmagories, de mes angoisses et de celles de Robert McLiam Wilson. Je n’ai plus qu’une vision parcellaire des événements et de leurs enchevêtrements. Les épisodes émergent d’une géologie mentale selon une logique aléatoire effrayante, mais diablement colorée. Comme le héros du roman : « je glisse, je flétris, je disparais ».

Ce moment de jeu est une parodie d’autobiographie, autant qu’une vision personnelle de l’œuvre de Robert McLiam Wilson. Ce spectacle est une sale maladie, une folie, un danger. Je ne vise pas la perfection formelle avec ce projet, ni le chef d’œuvre, je cherche juste le moyen d’anéantir ces derniers restes de jeunesse et de mesurer la distance qui nous sépare aujourd’hui de nos héros d’adolescence. Ripley Bogle est avant tout une manière d’aborder frontalement et de biais notre appréhension des précarités d’ordre sociale, physique, ontologique.

CORRESPONDANTS, DOUBLES, MIROIRS :

“He made up the person he wanted to be
And changed into a new personality” (Kraftwerk, Hall of mirrors)


J’ai choisi pour ce projet de travailler avec une équipe composée de comédiens professionnels et de non-professionnels SDF rencontrés à l’occasion d’un atelier de recherche mené à la Boutique solidarité-Fondation Abbé Pierre de Gagny. Partir avec eux vient d’une envie d’explorer la figure du double. En commençant par jouer sur les correspondances entre les acteurs SDF et leur porte-parole fictionnel (Ripley Bogle, jeune sans-abri nord-irlandais errant à Londres à la fin des années 80), il a d’abord été question de retrouver à travers les descriptions de son état des résonnances plus ou moins intimes à leurs expériences et situations actuelles.

Cette histoire est donc devenue progressivement la leur. Le mécanisme d’identification qu’ils ont accepté de suivre est finalement le même que le mien lors de ma découverte du livre. Ainsi, nous avons cheminé ensemble, calquant notre errance sur celle du héros à travers lequel la forme parle. Ce parcours a vécu trois étapes, la première à Gagny dans le centre d’accueil de jour où certains se rendent régulièrement, la seconde à la Ferme du Bonheur à Nanterre et la troisième à l’IUT de Paris dans le cadre d’un partenariat passé avec l’université Paris 5 – René Descartes, chaque station étant marquée in fine par la présentation d’une forme performative courte in situ. De l’avis des travailleurs sociaux qui suivent de près le projet, l’investissement des acteurs SDF dans ce travail est remarquable et la satisfaction qu’ils en tirent essentielle pour l’estime qu’ils peuvent avoir d’eux-mêmes. Ce projet a donc une utilité certaine dans la démarche de réinsertion des acteurs qui y participent. N’étant pas compétent pour développer ces questions, je peux seulement affirmer que je suis heureux de construire avec eux ce projet et touché de leur adhésion aux propositions que je leur fais.

Dans un second temps, je compte ouvrir notre équipe à des acteurs professionnels. De cette confrontation va naître une dramaturgie que j’envisage comme souple et évolutive, car elle laisse une place importante à la découverte et à l’improvisation. L’idée est de travailler à la fois sur un chœur d’acteurs et de fabriquer des « couples ». Ces duos sont créés sur la base de correspondances entre deux êtres, mais également sur le reflet plus ou moins fidèle d’une image (comme ces miroirs déformants dans les fêtes foraines) et plus encore, l’expression visible de l’assertion « et si », assertion de tous les possibles romanesques. Le couple n’est pas ici perçu comme la simple réalisation d’une complémentarité, mais plutôt comme celle d’une virtualité, d’un autre je. Il est un objet de réflexions. Au milieu de ces duos préconstitués, évolue le « vrai faux » Ripley Bogle. Comme une présence énigmatique et subliminale, il vient troubler la narration, l’enrichir, la dédoubler, l’infiltrer pour mieux la reprendre à son compte. Dans un protocole expérimental, il constitue la variable aléatoire, le hasard, l’erreur. Vêtu d’un costume trop grand pour lui, il arpente l’espace, apparaissant et disparaissant au gré de ses humeurs vagabondes, rejouant des scènes de son histoire, observant attentif le cours de la performance. Un peu détail dans le tableau comme l’Icare du peintre Breughel, un peu comme un Tadeusz Kantor démissionnaire et dépassé par ses fantasmagories, il incarne, mais à part, en arrière -plan. Si chacun s’identifie à lui, cherche à lui ressembler, l’invoque, le « vrai faux » Ripley Bogle, lui, ignore ces appels car il sait qu’il n’a pas d’équivalent : il est l’original, le seul.

POLYPHONIE ET POLYSEMIE:

“This is the sound of someone losing the plot -making out that they're okay when they're not.
You're gonna like it, but not a lot and the chorus goes like this:” (Pulp, The Fear)


Dans le roman, les choses sont simples : Ripley Bogle, né dans un quartier catholique populaire de Belfast ouest au milieu des années soixante connaît une jeunesse chaotique sauvée par la lecture. Parvenant à entrer à Cambridge, il finit par s’en faire virer et se retrouve à Londres où il devient vite sans-abri. Sur quatre journées, il va réviser son histoire, faire revivre les fantômes de son passé nord irlandais et livrer en détail sa vie de jeune clochard.

Il y a trois voix dans (Je suis) Ripley Bogle, celle de Ripley Bogle lui-même, celle de l’Insignifiant exprimant son impuissance face à des problèmes d’adaptation de tout ordre et celle de l’Internal DJ pour qui toute situation trouve son écho dans les paroles, les atmosphères d’un morceau de pop-music. Ces trois voix fictionnelles s’ajoutent aux voix des acteurs témoignant de leur propre rapport à l’histoire de Bogle. Cet ensemble polyphonique est le moyen choisi pour trouver une progression narrative à un récit éclaté et complexe. Les personnages ne sont pas nécessairement identifiables, chacune de ces voix étant à la fois unique et multiple. Pour ce qui est de l’organisation de ces voix dans l’espace de jeu, les musiques spectrales et le dub sont des sources d’inspiration pour cette dimension de notre recherche.
SUR LE PLATEAU ET DANS L’HISTOIRE :
“You’re invisible now, you’ve got no secrets to conceal” (Bob Dylan, Like a rolling stone)

L’esthétique générale du projet est celle d’une incursion de Dostoïevski au Muppet Show. Au milieu d’un dispositif scénique en apparence dépouillé mais parsemé de « pop-ups », surgiront par flashes Ripley Bogle et toutes les histoires qui se rapportent à lui. La scénographie est à l’image de cet espace mental, bouleversé et schizophrène. Des artifices simples créés à partir de matériaux pauvres (bois, cartons, couvertures de survie, miroirs) révéleront l’enfoui, le dissimulé, ce que nous nous refusons de voir, mais aussi ce que nous cachons. Le travail visuel est constitutif de la dramaturgie. Je privilégierai toujours l’image, la mise en lumière des corps et des visages à la parole. Le sens que je confère ici au mot image est celui donné à son étymologie latine : imago, c’est à dire aussi bien la copie, le portrait, la statue, le fantôme, l’ombre d’un mort.

mardi 13 avril 2010

16 avril 2010 /



Mission accomplie. Ce blog n'a plus lieu d'être.
Job done.
8 au 17 juin : (JE SUIS) RIPLEY BOGLE
Lieu : LA FERME DU BONHEUR (Nanterre)
Horaire : 21h00

vendredi 2 avril 2010

2 avril / (home-made) house made me hardcore



Une cabane et un temple.
Faits avec ce qu'on a trouvé sur notre chemin.
Montés avec l'ingéniosité de Michel et l'aide d'Etienne et de Guy.
Au centre de la cour. Immanquable. Visible. Trop remarquable.

Dans son coeur, le roman Ripley Bogle, l'objet livre, présenté comme une idole dérisoire.
Nous nous mettons à chercher des cigarettes pour lui. On taxe aux étudiants des clopes. On les allume avant de les placer autour de notre dieu (mon héros), comme autant de cierges autour d'une icône. Nous sommes recueillis. Nous prions.

Une quinzaine d'étudiants (et une prof) ont participé à cette cérémonie.

samedi 27 mars 2010

27 mars 2010 / Dispositif 1 : Nous sommes les invisibles


Fin d'une semaine. Beaucoup d'étudiants peu enclins à consacrer leur temps à autre chose que leurs révisions. On s'est incrusté dans leur décor en silence. Malgré eux, ils ont participé à (Je suis) Ripley Bogle. Ca s'est passé comme ça...
Abdel, Christine, Etienne, Guy, Michel et moi sommes disséminés dans l'IUT. Plus précisément, notre intervention est circonscrite à un espace qui va du rez-de-chaussée du bâtiment Blériot jusqu'à la sortie de l'université qui donne sur l'avenue de Versailles. Nous sommes donc présents dans le hall d'entrée, le couloir qui mène aux amphis, la cour.
Chaque acteur choisit une place dans l'espace et n'en change pas au cours de son intervention. A ses pieds, un panneau en carton sur lequel est inscrit "S.V.P JE SUIS UN GENIE AIDEZ-MOI". Chaque acteur a la possibilité d'ajouter à ce panneau d'autres panneaux contenant une affirmation, une définition (vraie ou fausse) du Ripley Bogle qu'il est/suit. Les textes écrits sur ces cartons doivent être lisibles pour les étudiants (écriture en majuscules avec des marqueurs). Aucune direction de jeu ou d'interprétation. On se tient à cette idée de personnes invisibles pourtant super-visibles. On s'y accroche.

Abdel et Christine sont enlacés dans le hall. Leur amour, leur âge, leur look constituent des éléments qui les rendent remarquables.



Etienne et Guy sont dans la cour. Guy lit un quotidien. Etienne fait des mots croisés. L'endroit où ils se trouvent est celui où les étudiants viennent fumer une fois sortis de classe.

Michel est en plein milieu du couloir. Il s'est fait une grande installation avec plusieurs cartons de différentes tailles (Michel quoi.) Il est absorbé par ses mots fléchés. Michel joue le jeu à fond.

Le Vrai-Faux Ripley Bogle est assis par terre dans un coin. Dans son dos, un grand panneau semblable au Plancher de Jeannot sur lequel est écrit à la main une suite de prénoms féminins. A ses pieds, deux panneaux : "ADOLESCENCE PASSED ME BY" et "REGARDE-MOI JE SUIS SUPERBE". Il lit le numéro d'avril de la revue La Recherche (Cancer, la révolution). Il ne lève les yeux de sa lecture que pour dévisager les étudiantes. Certaines, en bottes, en collants noirs, surmaquillées, lui sourient. Il est heureux. La plupart (blondes, peaux claires, belles mains) l'ignorent ou font mine de. Il a l'habitude.

L'intervention s'est bien passée. En bons Ripley Bogle, nous avons été ignorés, négligés, coupés au montage, escamotés du champ de vision des étudiants, mais dignes. Il y a eu une lumière démente à un moment. Cela a rendu, à un instant précis, le truc irréel.

jeudi 25 mars 2010

CHANGEMENT DE SALLE /// B4-9





B4-9
Dès demain.
A partir de 13h.
Et samedi.
Dès 9h.